N°13 - Août 2001

ANFAS-BRP/FAS-BA 921-95155 TAVERNY

L'équipe de rédaction                                          C.Auzépy-Thor-11 r. Chanez-75781 PARIS 16° 

Le mot du Président

Rappelez-vous. Dans les FAS, nous avions quelques rendez-vous sous forme d'exercices qui s'échelonnaient tout au long de l'année. Vous souvenez-vous de l'ambiance des ateliers lors des Poker et de celle que déclenchait l'arrivée, fortuite, au poste de filtrage, de l'équipe d'évaluation au moment du démarrage des banco max. Méthodiquement, le banco du deuxième semestre tombait toujours en fin d'année - mon fils est né un 21 novembre pendant le banco max, j'étais à l'EB 2/93 Cévennes, basé à Orange. Et pour celui de 1979, c'était en décembre, j'étais à Cambrai et la température extérieure avoisinait les - 7°.

Après avoir cherché tout l'été dans le ciel les vols d'entraînements des avions de notre armée de l'air et avoir du me contenter d'un Alpha jet en ras dada sur ma Bretagne ; après avoir surveillé les goélands dans leurs combats tournoyants, admiré les mouettes lors de leur " salut du cobra ", le même que le Sukhoi S-27 ( à Loctudy, il y a une école de formation à cette figure mais uniquement pour les mouettes ), après avoir reconduit enfants et petits enfants sur les chemins du travail et de l'école, pour ne pas prendre de mauvaises habitudes de retraité trop heureux ou trop affairé, comme dans notre précédente vie, je vous offre l'occasion de mettre à jour votre tableau d'exercices. Je vous invite le 6 octobre à une journée patrimoine FAS à la Cité des Sciences à la Villette. 

Au programme : une visite et une conférence sur la reconnaissance stratégique.

Je fais appel en particulier à tous ceux qui ont travaillé sur le Mirage IV N°45. Cet avion est exposé depuis quelques années sur ce site du savoir et de l'intelligence. Que ceux qui l'ont côtoyé viennent raconter son histoire. Venez faire frémir de plaisir les électrons de sa mémoire. Car, croyez moi, nos avions ont la mémoire de leur vie terrestre. Ce 45 - F-THBR saura nous reconnaître depuis le paradis des avions heureux et chacun de nous entendra les mots que l'avion lui murmurera. Je vous attends dans le hall à 10 h, ce 6 octobre 2001.

Le site ANFAS http://anfas.free.fr s'installe tout doucement. Que ceux qui le souhaitent s'inscrivent dans le fichier des membres Anfas ; seule exigence : être à jour de cotisation. 

Dès le début de 2002, nous allons nous servir de ce fichier pour expédier les courriers Anfas. Nous sommes ouverts à toutes suggestions de votre part. Vous y trouverez également des liens vers les C 135 FR d'Istres et d'autres sites de l'aviation.

Extrait de la vie quotidienne

UN VOL COMME LES AUTRES. (février 1980).

- Pilote : " PC droite " ; Nav : " OK, c'est bon ".
- Pilote : " PC gauche " ; Nav : " OK, c'est bon ".
- Pilote : " Calcaire 354, décollage ". " T4 correctes, le badin décolle ".
J'égrène les secondes : " 13 14 15 16 "
- Pilote : " 100 kts " 
- " C'est bon, on continue ".
Je sens l'avion, tel un obus, il semble devenir ingouvernable. Par rapport aux lumières, la vitesse de défilement s'accentue.
" V2 ". C'est parti. Sauf problèmes importants, on va être en l'air. Les fesses se détendent.
" Roulette. 10° boule ". Je sens tout ce que fait le pilote. J'aimerais être assis près de lui. Nous épouserions mieux l'avion à tous les deux. " Frein ", " Train ", " Bout de bande ". Le calculateur est en marche. L'avion accélère, l'alti monte doucement.
" Train rentré ".
Ca y est. Nous sommes dans les azurs, dans les nuages : nous sommes un avion.
" Cap 210, 3500 pieds, je vous rappelle pour monter "
L'approche a une voix de femme aujourd'hui.
" Cap 290, début de montée "……
" Calcaire 354, 30 nautiques, 210 station, contactez Menthol ". Salut jeune fille, à tout à l'heure. J'espère que tu seras encore là, à notre retour, pour nous accueillir.
Le radar est en route. Un coup d'émission pour vérifier le cap et la position.
Les nuages commencent à s'effilocher. La lumière devient plus importante. C'est l'explosion dans le soleil : nous avons rattrapé le soleil. Pour les quidams du bas, il est couché ; pour nous, il va nous accompagner dans les vagues de l'Atlantique et se coucher à nouveau.
Mission de routine : un Mirage 4 décolle de nuit. Cela fait douze ans que je fais ce type de mission. Le pilote est plus récent que la " bête ". Mais son expérience et son sérieux " font plaisir à voler avec lui ". Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que nous sommes ensemble.
Nous avons passé plus de deux heures à préparer et à nous briefer sur cette mission. Est-ce que je lui ai tout dit ? Je n'ai peut-être pas assez insisté sur la panne boule à la fin de la ressource. Je lui en toucherai deux mots avant le début de la descente.
Le soleil est plein travers. Son bord inférieur disparaît dans la mer de nuages. Les rayons commencent à 


rougeoyer. Je tends le cou, je déverrouille les bretelles, je ne veux pas rater ce spectacle, je suis aux premières loges. Pendant 5 minutes, personne ne parle : l'avion va glisser tout seul, aux ordres du pilote automatique. Nous n'échangerons que ces quelques mots : " qu'est-ce que c'était beau ".

Allez, pas de regret, un petit merci au Seigneur pour ce coup d'œil gratuit, un coup de radar pour recalculer l'heure du rendez-vous avec le C135 ravitailleur. Le boulot reprend ses droits. Nous sommes sur route, à l'heure. C'est le pied. Une grosse étoile me fait de l'œil dans la lucarne de gauche.

Nous avons rendez-vous avec un C135 d'Istres sur l'axe 49. C'est la zone de ravitaillement, un petit bout sur terre du côté de Béziers, un gros bout sur la mer jusqu'au sud de Marseille, à 10 kilomètres d'altitude. Nous devons rejoindre la grosse bête à partir d'un point précis appelé Fox. Un Mirage IV sera déjà en train de faire le plein. Et pendant que le pilote prendra nos 5 tonnes de carburant, un autre Mirage IV nous remontera pour venir se mettre en patrouille à droite. 5 minutes environ pour prendre 5 tonnes. 7 minutes de ligne droite sur l'axe. Il ne faut pas que le pilote perde de temps.
C'est l'heure : " Marcotte 350 de Calcaire 354 ".
" 350 de 354, Fox à 28, il est 18 et 10 secondes, top ".
" Reçu ".
Nous avons 10 secondes de décalage entre nos montres. On a vu pire. Les manettes règleront l'écart.
Un nouveau calcul d'heure pour le point de virage sur Fox : 30 secondes de retard. Le pilote s'est endormi sur le mach. Allez, on est bon pour 2 points de mach en plus.
J'ai le contact sur la balise du C135. Il est à 2 heures, 70 kilomètres. Vite, le coin mental à calcul se met en route : 70 - 46 = 24 : 16 = 1,5. Dans 1 minute et 30 secondes, il doit virer. Le contrôleur d'Istres commence à s'inquiéter." Calcaire 354, vous avez le visuel sur le tanker ? ".
Cela fait 10 ans que ses chefs lui disent qu'ils ne veulent pas voir deux plots confondus sur un scope. Alors il voudrait bien qu'on lui dise quelque chose. Mais non, mon vieux, laisse-le un peu se rapprocher. Tu n'as pas mis le nez dehors aujourd'hui. Les cirrus commencent à arriver de l'ouest. On te le dira quand on sera dessus comme cela tu mouilleras peut-être ta chemise. Le C135 a viré vers le cap 270. Nous sommes au ras des cirrus. Il doit être un peu au-dessus. La distance de 12 nautiques arrière est confirmée par le radar et le tacan.
Nous avons 50 nautiques pour le remonter. Les feux de navigation de la bête commencent à se deviner. Un autre feu jaune, plus gros, vient de s'allumer : le Mirage IV qui tête avant nous vient d'allumer sa PC pour tenir enquillé.
Pour l'entraînement, je guide le pilote jusqu'à 1 kilomètre du C135 : nous avons le visuel depuis 10 nautiques. Cela servira peut-être lorsque nous serons dans des conditions météos nettement plus défavorables. Aujourd'hui, c'est le plaisir. Demain il faudra peut-être sortir le grand jeu.
La patrouille est tenue comme dans le livre. C'est un pinailleur mon pilote. Le Mirage précédent a fini son ravitaillement. Il déconnecte et se glisse en perche à 

gauche. Il va disparaître de notre champ de vision. Il va poursuivre sa mission.
Nous préparons l'avion pour le ravitaillement : je lis la ckech-list, le pilote répète et exécute les opérations avant RVT. (A suivre…. )
Jacques PENSEC

ATTERRISSAGE " COURT ".
Quelques précisions concernant l'atterrissage réputé "le plus court de l'histoire des M IV ".
(NDLR. Voir ANFAS Contact n°10 " les petites histoires au quotidien " de notre camarade Jean HERREMAN.)
Cet incident a eu lieu non pas le 14 juillet, mais le 17 juin 1965, au retour du défilé aérien au Salon du Bourget. Toute la formation avait effectivement décollé de Brétigny, avec retour à la maison à l'issue du vol.
Mais la cause du blocage des roues à l'ATR a bien été élucidée. Herreman ne s'en souvient peut -être pas, ou sans doute est-il trop gentil ?. 
Le pilote de ce M IV ( l'un des meilleurs pilotes de l'armée de l'air comme tous les pilotes du GB 1/91 à cette époque !) avait tout simplement décollé de Brétigny, en n° 2 ( ?) avec le frein de parking….serré !
Les deux PC n'ont fait qu'une bouchée de cet obstacle dérisoire et le décollage, puis le vol se sont déroulés sans aucun problème la poignée du frein de parking toujours tirée. 
Oh la surprise à l'arrivée ! 
Les numéros 3 et 4 n'ont plus eu qu'à remettre les gaz et se dérouter sur Cazaux. 
Un mois plus tard, les Mirage IV ont effectivement pris la tête du défilé du 14 juillet pour la première fois de leur histoire, également à partir de Brétigny. mais cette fois sans problème.
Amitiés à tous P. CAUBEL

Appel à documents et reliques 
N'oubliez pas de déposer votre pierre pour construire l'histoire.

Lundi 29 avril, au cours de son Assemblée Générale, j'ai eu la grande satisfaction de voir l'ANFAS offrir au Musée de l'Air et de l'Espace (MAE) quelques brochures historiques et deux documents particulièrement intéressants car authentiques en tant que témoignage de la vie des personnels des FAS. Il s'agissait d'un jeu de calques de navigation sur Mirage IV A et d'un manuel d'emploi de B 58, obtenu au début des années 60 au cours d'un stage auprès du Stratégic Air Command.
Ces documents ne sont certainement pas les seuls à avoir survécu à votre passage dans les FAS et à dormir aujourd'hui dans des caisses chez vous. Prenez le temps de faire quelques recherches et pensez au SHAA et au MAE si vous trouvez dans vos archives des photos, des cartes, des documents techniques, des reliques…
La mémoire de votre histoire dépend de vous. Les services officiels ne peuvent conserver que ce qui leur a été donné.


Comment contacter le musée de l'Air et de l'Espace :
Aéroport du Bourget, BP 173, 93352 Le Bourget.
Tél. service de documentation : 01 49 92 70 20.
Télécopie : 01 49 92 70 95. E.Mail : MUSEE.AIR@wanadoo.fr

Gal Jean-Paul SIFFRE, ancien Directeur du MAE.